Blognotice 14.08.2017: Sècheresse, canicule et feux de forêts – au Maghreb aussi !

Pendant qu’une partie de l’Europe est plutôt victime d’un temps d’été maussade, – à Grünstadt par exemple : depuis la nuit du Mercredi au Jeudi 9août au 10 août 2017, il a plu plus au moins sans relâche jusqu’au Dimanche matin 13.08.2017, une grande part de la partie occidentale de la Méditerranée est touchée par la sécheresse et la canicule et par une vague de feux de forêts. Le Portugal a été particulièrement touché par la vague de feux de forêt et je rappelle  simplement l’incendie de Pedrógão Grande avec ses 64 morts,  ce qui d’après mes connaissances semble être un des feux de forêts les plus meurtriers qui ait sévi en Europe depuis la deuxième guerre mondiale, il devrait venir  jusque après « l’Incendie de la forêt des Landes de 1949 [1]», auquel j’avais dédié un billet en juillet 2009 – sous le titre « 1949 – l‘incendie meurtrier dans la Forêt des Landes ». Les températures  début aout 2017 ont atteint de nouvelles pointes sur la cote languedocienne, et même à Leucate le thermomètre atteignait le 37,5 le 4 aout 2017. Leucate, ce petit coin de côte sur les rives de la méditerranée que mes grands-parents avaient choisi pour échapper à la lourdeur des étés (et ses lots d’orages) dans la plaine du Rhin à Strasbourg/Eckbolsheim, et plus tard  comme lieu de villégiature pour fuir les vagues de chaleurs estivales du Bas-Languedoc quand ils se sont installés à Aubod près de Nîmes dans le Gard[2]. Des grosses chaleurs à Leucate/Port Leucate dépassant les 35 : fait rarissime à mon avis ! Dans les années 1960/70 c’était surtout le pays du soleil et du vent, du sable et de la mer – mais sans chaleurs excessives. Naturellement il ne s’agit ici que des souvenirs d’enfance et de jeunesse d’un bloggeur de week-end, – pour dresser un diagnostic plus précis il faudrait réellement comparer les données météorologiques historiques à long terme. Mais on peut déjà conclure, que la première partie de l’été 2017 au Portugal, en Espagne, dans le Midi méditerranéen français, et dans le Sud de L’Italie fut particulièrement chaude, sèche et propice aux feux de forêts  et les médias français – (et mêmes les médias allemands) nous en ont beaucoup parlé.

Sur la façade sud de la méditerranée, même scenario, sécheresse, chaleur et vague d’incendie touche le Maghreb surtout l’Algérie et la Tunisie, – mais dans nos médias cela ne compte pour ainsi dire pas.

La Tunisie semble particulièrement touchée par une sécheresse accrue, une vague de feux forets  est en train de dévaster une partie de forêts dans un triangle entre Bizerte, Tabarka en Jendouba. Ceci me touche particulièrement car nous retrouvons un peu la situation que nous, mes collègues tunisiens et moi, avons décrite en 2005, 2006 concernant la réaction des écosystèmes tunisiens face aux changements climatiques[3]. L’augmentation des risques de feux de forêts que les changements climatiques engendreraient était certainement un des principaux résultats de ces recherches appliquées, je me permets donc de citer une phrase du document que nous avons remis au gouvernement tunisien en 2007 « La progression des incendies, surtout de grands incendies nécessitant des grands stocks de combustibles, dans le Nord tunisien, peut avoir des conséquences particulièrement négatives pour toute l’économie tunisienne car elle met en danger les systèmes des barrages et l’approvisionnement en eau d’une grande partie de la Tunisie. L’éclosion de grands feux ainsi que leur multiplication pourrait engendrer des phénomènes d’érosion et dans certains cas provoquer des glissements de terrains qui pourraient perturber le fonctionnement d’un ou même plusieurs barrages » (Neff et al 2007). On n’en n’est pas encore arrivé la , mais si la situation perdure durant les étés suivants on pourrait bien y arriver. D’ailleurs dans un papier édité dans le sillage de cette étude , voyant le risque grandissant de feux de forêts au Maghreb , j’avais conseillé :« Achats et gestion commune (Etats Maghreb) de Canadair » (Neff 2005,p. 14). J’écris ceci par rapport à ce que j’ai lu dans les réseaux sociaux sur la gestion des incendies de forêts en Algérie et en Tunisie – et surtout sur le manque cruel de matériel moderne de défense contre l’incendie – la fameuse DFCI comme on la nomme en France.  Il ne s’agit pas de se souvenir de vieux papiers qui dorlotent  quelque part à l’administration tunisienne et dans les quelques placards de la GIZ à Tunis ou à Eschborn, et qui n’ont certainement trouvé qu’une poignée de lecteurs attentifs durant les dernières 10 à 15 années mais bien de rappeler que de solutions existent, elles  sont connues : il suffit simplement de les appliquer ! Mais naturellement il s’agit là d’un choix politique. Ces choix sont parfois difficiles, voir la discussion et la polémique sur l’état de la flotte de Canadair en France [4].

Les feux de forêts dans le Maghreb, comme je connais assez bien la situation en Tunisie je me concentre surtout sur la Tunisie, ces feux   concernent aussi l’Europe, – et en premier lieu la France et l’Allemagne. Il faut donner les moyens à la jeune république Tunisienne pour faire face au défi du changement climatique[5]. La transition démocratique même sans « changements climatiques » est déjà un défi considérable.  Donc ceci nous concerne aussi en Europe. Les habitants des forets entre Sejnane et Tabarka : où iront-ils une fois leurs forêts parties en fumée ? Les écosystèmes méditerranéens ont une très bonne résilience face aux incendies : dans quelques années les écosystèmes forestiers se seront reconstitués– sauf si la fréquence d’incendie devient trop intense – mais les hommes qui y habitent, qui tirent de leurs forêts une ressource (monétaire ou autre), que font-ils pendant que la forêt se régénère ?

Au-delà des problèmes de sècheresse et des incendies de forêts, la Tunisie connait également une crise de l’eau, je dirai peut – être plus une crise de gestion de l’eau – au sens du terme « good-governance » – terme qui d’ailleurs n’existe pas (ou pas encore) dans la Wikipédia française. Au sens anglais du terme « good governance » la Tunisie semble en fait être loin d’une « good-governance » de l’eau – d’une bonne gestion du bien public qui est la ressource eau ! C’est au moins l’impression que j’ai en suivant les différentes interventions publiques de  Raoudha Gafrej sur la « gouvernance de l’eau » en Tunisie[6] – Raoudha Gafrej amie et collègue avec laquelle j’ai eu le plaisir de travailler ensemble pendant mes années tunisiennes[7], mes divers projets de recherches en Tunisie, dont le projet GIZ sur les changements climatiques en Tunisie.

Littérature citée :

Abaza, K. (2015) : Analyse de la régénération spontanée de la végétation post-incendie dans la forêt de Dar Chichou (Cap Bon, Tunisie Nord-Orientale). In : Rev. Roum. Géogr./Rom. Journ. Geogr., 59, (2), p. 159–172, 2015, Bucureşti (download ici)

Chriha, S., Sghari, A. (2013) : Les incendies de forêt en Tunisie – Séquelles irréversibles de la révolution de 2011. In : Méditerranée, no 121, p. 87 – 92. (download ici)

Neff, C., Aloui, A., El Hamrouni, A., Souissi, A., Grossmann, A. (2007): Ecosystèmes. S. 33–43. In: République Tunisienne, Ministère de l’agriculture et des ressources hydrauliques, GTZ (Coopération technique allemande) (Hrsg.): Stratégie nationale d’adaptation de l’agriculture tunisienne et des écosystèmes aux changements climatiques, Cahier 7, Rapport des groupes d’ experts.

Neff, C. (2005): Ecosystèmes tunisiens – une vision prospective face aux changements climatiques et globaux  In: République Tunisienne. Ministère de l’Agriculture et des Ressources hydrauliques, Coopération Technique Allemande – GTZ (Eds). Elaboration d’une stratégie nationale d’adaptation de l’agriculture tunisienne et des écosystèmes aux changements climatiques, Rapport 1ère Phase, Tunis (11.10.2005), 136 – 153.

Christophe Neff, Grünstadt le 13.08.2017, publié le 14.08.2017

[1] Voir aussi le billet: « Le 19 août 1949 – le drame de la Forêt des Landes »

[2] Voir aussi le billet: « Blognotice 7.08.2013: Les cigales de Port Leucate »

[3] Dans un projet de recherches sur les conséquences du changement climatique pour l’agriculture et les écosystèmes tunisiens. Ce projet était financé par la GIZ – la coordination scientifique était assurée par Gonzague Pillet. Le titre officiel du projet était « Elaboration d’une stratégie nationale d’adaptation de l’agriculture tunisienne et des écosystèmes aux changements climatiques ».

[4] Voir aussi : « Incendie. Une flotte de Canadair à bout de souffle » ; « Une flotte vieillissante pour lutter contre les incendies »

[5] Concernant la dynamique récente des incendies de forêts en Tunisie on lira avec intérêt les articles suivants : « Les incendies de forêt en Tunisie – Séquelles irréversibles de la révolution de 2011 (Chriha & Sghari  (2013) » et « Analyse de la régénération spontanée de la végétation post-incendie dans la forêt de Dar Chichou (Cap Bon, Tunisie Nord-Orientale) (Abaza 2015)

[6] Voir aussi: « Selon Raoudha Gafrej, experte en gestion des ressources en eau, la situation hydrique de la Tunisie est alarmante » Huffpost Tunisie 1.8.2017

[7] Voir aussi le billet « Des paysages à l’infini – « Algérie, la mer retrouvée » – sur l’émission Thalassa du 03.04.2015 »

Blognotiz 22.03.2017: Rückblick auf das Paysagesblog im Jahr 2016

Vue sur le lido entre Leucate-Plage et Port Leucate 14.10.2016

Wie schon in den letzten Jahren (2015, 2014) , erfolgt auch nun hier ein kurzer Rückblick auf das vergangene Jahr im Paysagesblog, d.h. eine Aufzählung der Artikel des paysagesblog, welche im Jahr 2016 am häufigsten besucht oder gelesen wurden. Da ich schon im Beitrag « Rétrospectives sur le blog paysages en 2016 – les billets les plus lus de « paysages » en 2016  » eine ausführliche Retrospektive für das Jahr 2016 veröffentlich habe, werden die Artikel hier nur in Tabellenform wiedergegeben.

Titel Leseranteil
Blognotice 12.2.2012: la banquise bloque le Port de Port Leucate  10,23%
Blognotice 28.07.2014: Bientôt le souvenir de l’église catholique chaldéenne et des églises syriaques (orthodoxes & catholiques) ne sera plus qu’un souffle de vent chaud dans le désert    3,48%
Blognotice 13.10.2016: La mer déferle sur les plages leucatoises    2,12%
1949 – l‘incendie meurtrier dans la Forêt des Landes    1,92%
Lundi 11 octobre 2010 – la mer se déchaîne sur la plage de Port Leucate    1,78%
Commentaire sur « Le piège Daech – l’Etat islamique ou le retour de l’Histoire » de Pierre – Jean Luizard    1,70%
Blognotice 15.08.2015: Incendies de forêt à Schramberg en Forêt-Noire et processus de californisation du paysage     1,48%
Das Biafrakind    1,43%
Blognotice 7.6.2012: changements de paysages dans le pays Leucatois    1,36%
Über den Zuaven vom Pont d’Alma in Paris und Kindheitserinnerungen an Unwetterereignisse in Schramberg    1,32%
Summe :  26,82%

Wie schon hier (auf französisch) im Detail erläutert ist das Paysagesblog auch im Jahr 2016 ein Blog über das kleine Städtchen Leucate an der französischen Mittelmeerküste gewesen. Analog zum französischen Beitrag habe ich deshalb auch ein Bild ausgewählt  welches einen Blick vom Cap Leucate auf den Lido von Leucate Plage über Port Leucate nach Le Barcarès zeigt. Das Bild wurde einen Tag nach dem verheerenden Unwetter vom 13.10.2016 aufgenommen[1]. Es zeigt sehr gut die Fragilität des Lido’s der das offenene Mer vom Étang de Leucate abtrennt. Vor einigen Jahren, im März 2010, schrieb ich einen Beitrag für Paysages der die Gefahren die dem Lido, vor allem dem Teilort Port Leucate, durch Meereseinbrüche droht, relativ ausführlich darstellt[2]. Als ich diesen Blogbeitrag verfasste, war das Thema „Meereseinbrüche“ in Leucate und Umgebung, so noch nicht in der lokalen und regionalen Öffentlichkeit präsent, – aber inzwischen scheint man zu verstehen, dass das Meer bei außergewöhnlich starken Stürmen auch Gefahren für die Lidoküste birgt, vor allem für die Siedlung Port Leucate die ja auf einer Sandinsel im Lidobereich gebaut wurde.

Immerhin gab es 2016 zwei deutschsprachige Artikel unter den zehn am meist gelesen Beiträgen in Paysages, – beide Beiträge thematisieren Kindheits – und Jugenderinnerungen aus der Raumschaft Schramberg. Das Biafrakind, eigentlich „das Biafrakind vom Schoren“, ist ein Rückblick an meine Erinnerungen an die „Biafrakinder“, – die als wir noch auf dem Schoren in der Bergvorstadt Schramberg-Sulgen lebten in aller Munde waren. Der Artikel „Über den Zuaven vom Pont d’Alma in Paris und Kindheitserinnerungen an Unwetterereignisse in Schramberg“ beschreibt das Unwetter vom 24. Juli 1972 welches Schramberg heimsuchte, – Unwetter welches einen beträchtlichen Schaden vor allem in der Talsstadt hinterließ, wobei dieses historische Hochwasserereignis wie viele andere historische Unwetter in Südwestdeutschland heute fast schon vergessen ist.

Ich habe hier noch ergänzend, in der folgenden Tabelle, die fünf am häufigsten deutschsprachigen Artikel in Paysages aufgeführt[3]. Verglichen mit der in der ersten Tabelle aufgeführten Lesefrequenz der ersten zehn Artikel sind das dann doch eher bescheidene Zahlen. Wahrscheinlich entstammt ein Großteil meiner deutschsprachigen Leser doch eher dem erweiterten Freundes und Bekanntenkreis, während die französischsprachigen Artikel doch eine weit größere Reichweite erfahren, und wohl nicht nur in Frankreich gelesen werden, sondern wohl in der gesamten Frankophonie (In 2016 mit Schwerpunkten in Belgien, Tunesien, der französischsprachigen Schweiz, Algerien und Québec in Kanada  ).

Pos. Titel Leseranteil
07 Das Biafrakind  1,43%
10 Über den Zuaven vom Pont d’Alma in Paris und Kindheitserinnerungen an Unwetterereignisse in Schramberg 1,32%
12 Bonne année 2016 et bon voyage 2016 sur „paysages“[4] 1,10%
20 A propos[5] 0,78%
29 Blognotiz 01.03.2016: Phänologische Betrachtungen an der Unterhaardt/ Observations phénologiques dans la Unterhaardt (zweisprachige Blognotiz/billet bilingue dt./fr.) 0,53%
Summe 5,16%
BB426091 21.05.2016 Leucate -La Franqui

Abschließend und analog zum französischen Pendant des vorliegenden Artikels  noch ein Bild der SNCF BB 426091 vor einem Güterzug Richtung Spanien bei der Durchfahrt des kleinen Bahnhofes von Leucate-La Franqui.

Christophe Neff, 22.03.2017

[1] Im Blogbeitrag „Blognotice 13.10.2016: La mer déferle sur les plages leucatoises“  finden sich Bilder dieses denkwürdigen Ereignisses.

[2] Sturm Xynthia : Blick von der Unterhaardt auf La Faute-sur-Mer, L’Aiguillon und Port Leucate

[3] Der am häufigste englischsprachige Artikel ist „The Fatal Forest Fire – remembering the “1949 Mega fire” in the „Forêt des Landes” (South West France)“ (Pos 11; 1,3%)

[4] Bonne année 2016 et bon voyage 2016 sur „paysages“ ist eine dreisprachige (frz./engl./dt.) Neujahrskarte mit einem Triebwagen der Reihe 628  der DB  welcher in Herxheim am Berg fotografiert wurde  als Motiv.

[5]A propos“ ist eine dreisprachige (frz./engl./dt.) kurze Selbstdarstellung des Verfassers des Paysagesblog.

Une gerbe de fleurs d’abricotier en souvenir des sept moines de Tibhirine

Il y a vingt ans[1], dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, vers une heure du matin furent enlevés les 7 moines de l’Abbaye Notre-Dame de l’Atlas à Tibhirine[2],[3]. Les têtes des sept moines assassinés furent retrouvées fin Mai 2006  dans les environs de Médéa. Vingt ans après ces crimes les circonstances de leur assassinat n’ont toujours pas été élucidées[4],[5]. Ce crime m’avait fortement marqué il y a vingt ans. Je suivais les évènements de la décennie noire en Algérie de près[6], et ce crime, ce drame reste gravé dans ma mémoire comme le symbole des drames sanglants que subissait le peuple algérien pendant la décennie noire,  massacres sanglants à répétition dont souvent on ne savait pas très bien si c’étaient les bourreaux du GIA, ou bien les tortionnaires des forces de sécurité algériennes qui en étaient les responsables. Concernant les responsables de l’assassinant des moines de Tibhirine, je crois que le mystère ne sera levé  (comme pour beaucoup d’autres crimes de la décennie noire), que si l’Algérie devient réellement une vraie démocratie et que les Algériens retrouvent la parole libre et la liberté. Malheureusement, on est encore bien loin de l’établissement d’une vraie démocratie en Algérie,  et en outre, de nouvelles anciennes menaces semblent de plus en plus peser sur l’Algérie[7].

Comme je l’ai déjà écrit ici dans paysages, le jour viendra où je ferai le voyage vers Tibhirine pour déposer une gerbe de fleurs à la mémoire des sept moines assassinés. Mais aussi en mémoire des innombrables massacres dont les algériens furent victimes durant la décennie noire. Faute de mieux, je laisse ici une photo d’une branche d’abricotier en fleurs de notre jardin à Grünstadt. En souvenir de Christian de Chergé, Luc Dochier, Christophe Lebreton,  Michel Fleury, Bruno Lemarchand, Célestin Ringeard, Paul Favre Miville –  mais en souvenir innombrables victimes de la décennie noire en Algérie.

fleurs d'abricotier Grünstadt-WR 27.03.2016
Fleurs d’Abricotier à Grünstadt © Christophe Neff 26.03.2016

Source :

Chebel, Malek (2012) : Dictionnaire amoureux de l’Algérie. Paris (Plon), ISBN 978-2-259-21236-6

Photo : Fleurs d’Abricotier à Grünstadt © Christophe Neff 26.03.2016

Christophe Neff,  Grünstadt, Pâques 2016 (publiée le  29.03.2016)

P.S : Dans le contexte de mon billet, je me permets de signaler la parution prochaine d’un livre à la mémoire et à l’héritage des moines de Tibhirine :  Henning, Christophe (Ed) : Tibhirine, l’héritage. Bayard, 178 p., 14,90 €, ISBN 978-2227488700. En librairie le 7 avril.

[1] Voir aussi « L’enlèvement des moines de Tibhirine : 20 ans après » et «À Tibhirine, la mémoire de sept vies données »     sur le site de L’Église catholique d’Algérie.

[2] Voir aussi l’article de  Anne-Bénédicte Hoffner et Chloé Rondeleux  « A Tibhirine, la mémoire de sept vies données » dans la Croix.

[3] Voir aussi le site « Les moines de Tibhirine »  site dédié aux moines de Tibhirine.

[4] Voir aussi l’article de Pierre Leipidi  « Les moines de Tibhirine restent otages des relations franco-algériennes » dans le Monde Afrique.

[5] Voir aussi le chapitre « Moines de Tibhirine » dans le Dictionnaire amoureux de l’Algérie, chapitre qui débute avec les phrases suivantes : « Connaîtra-t-on jamais la vérité ? Les sept moines trappistes de Tibhirine,monastère situé non loin de Médéa, à moins de 100 kilomètres d’Alger, sont morts à une date inconnue et furent enterrés en mai 1996 (Chebel, M. 2012, p. 430).

[6] Voir aussi les articles:  « Des paysages à l’infini – « Algérie, la mer retrouvée » – sur l’émission Thalassa du 03.04.2015 », « Blognotice 11.04.2015: A la recherche des souvenirs d’un vieux texte de 2001 « Deux ou trois choses que j’ai vues de l’Algérie» de François Maspero ».

[7] Voir l’analyse récemment publiée par Gerow von Randow:  „Vor dem Sturm Algerien treibt auf eine schwere Krise zu. Al-Kaida und „Islamischer Staat“ lauern auf ihre Chance“ – il existe une traduction anglaise sous le titre:  „ Before the Storm Algeria is drifting toward a major crisis, and Al-Qaeda and Islamic State are just waiting for their chance”.

Homme libre – Homme livre: François Maspero

Francois Maspero et les paysages humains  scan CVL1A peine avais-je publié mon dernier billet sous le titre « A la recherche des souvenirs d’un vieux texte de 2001 « Deux ou trois choses que j’ai vues de l’Algérie» de François Maspero » » me parvenait avec la poste le beau livre « François Maspero et les paysages humains ». Toute suite je me mis à le feuilleter, à lire les premiers chapitres …. et finalement je retrouvais aussi le lieu où François Maspero avait passé une partie de l’été 2001, en Algérie, sur la côte algérienne. Lundi matin , le 13 avril 2015, j’apprenais via l’article de Catherine Simon, que François Maspero venait de décéder durant la journée du Samedi 11.04.2015, – donc la même journée que j’avais publié ma petite notice de blog sur cet été 2001 que François Maspero avait passé sur la côte algérienne, que je recevais le livre sur la vie et l’œuvre de François Maspero – « Homme libre – Homme livre[1] ». Etrange coïncidence….   On peut trouver une nécrologie intéressante chez Pierre Assouline dans la RDL, – dans le Monde version papier nous trouvons une nécrologie exhaustive sous le titre « François Maspero – Editeur et écrivain » de Catherine Simon[2]. Catherine Simone nous parle aussi un peu de ce livre « François Maspero et les paysages humains » que je viens de recevoir. Elle parle d’un bel ouvrage consacré à François Maspero[3]. Oui ce livre est un bel ouvrage sur la vie et l’œuvre de François Maspero – c’est une véritable géographie humaine des paysages intérieurs de François Maspero, de sa vie avec et pour les livres, – mais c’est aussi d’une certaine manière une histoire des rêves d’une certaine gauche française, – ses rêves, ses illusions perdues. Le livre est une véritable source de témoignages, de documents sur la vie, les livres et les hommes qui entouraient François Maspero. Ces témoignages débutent avec un chapitre intitulé « la fidélité  Maspero [4]» de Edwy Plenel, – et finissent avec le chapitre « un sacré colibri » de Patrick Chamoiseau. Sur presque 70 pages Julien Hage nous livre une histoire détaillée des librairies et éditions Maspero[5]. Nous trouvons dans ce livre une reproduction des couvertures des livres des éditions Maspero, – et un catalogue des éditions Maspero, faisant de ce livre aussi une documentation sur l’édition française après-guerre. Dans la deuxième partie du livre nous trouvons entretiens et témoignages avec François Maspero. C’est ici dans cette partie témoignage que nous pouvons retrouver les traces et les lieux du texte « Deux ou trois choses que j’ai vues de l’Algérie ». C’est dans la reproduction du Postface à la réédition des Romans de Sadek Aïssat[6][7] que nous apprenons où François Maspero avait passé l’été 2001. Je ne me suis pas trompé en écrivant dans les notes en bas de page que je pensais « que le texte de Maspero  ne parle pas de Bejaïa, mais bien d’une ville tournant le dos à la plaine de la Mitidja dans les environs d’Alger » car François Maspero avait bien passé l’été 2001 à Aïn Taya dans la banlieue est d’Alger. Dans ce contexte je me permets de citer un extrait de ce texte « Et donc est arrivé cet l’ été 2001 où Sadek m’a fait ce nouveau cadeau, le plus beau de tous. Après dix ans passés loin du soleil natal, il avait décidé de revenir sur sa terre. Et il m’a demandé de venir avec lui. De partager avec lui l’émotion de ce retour tant attendu, probablement craint aussi : qu’allait-il retrouver ? Un tel acte de confiance ne se refuse pas : il ne peut qu’éblouir celui qui en est l’objet. Ce fut ce mois de lumière passé à Aïn Taya. Chez sa sœur, qui ne s’attendait certes pas à voir arriver, avec sa famille, cet ami français inconnu et dont elle lui dit simplement : « Qu’il vienne, puisque c’est ton ami ».

Nous trouvons dans ce livre aux pages 327 – 331 une bibliographie-filmographie où sont inventoriés les livres et textes écrits par François Maspero, ses traductions, mais malheureusement le texte auquel j’ai consacré mon dernier billet « Deux ou trois choses que j’ai vues de l’Algérie » publié le 22.Novembre 2001 par le Monde n’y figure pas.   C’est un peu dommage. Mais à part ça le livre « François Maspero et les paysages humains » est un merveilleux livre a l’honneur de François Maspero, – une mine de savoir et de témoignages quasiment inépuisable sur la vie et les livres de François Maspero.

Je ne suis pas un spécialiste de François Maspero, – simplement un simple lecteur bloggeur citoyen du week-end, – je crois qu’une des dernières interviews que François Maspero a données fut l’entretien « Entretien avec François Maspero : « Quelques malentendus » dans la revue période. Cet entretien mérite la lecture car on y trouve un condensé de ses rêves et de ses combats. Peut-être les amis de François Maspero pourront-ils établir une sorte de « Werkverzeichnis » où on trouve tous ces textes, traductions, productions, entretiens documentés.

Finissons ce billet avec une vue sur l’Allemagne – malheureusement en Allemagne il semble que François Maspero semble être un illustre inconnu, son décès est presque passé inaperçu. Certes il faut dire que le décès de Günter Grass, le dernier « deutsche Großintelektuelle » de l’après-guerre (écrivain-intellectuel engagé) comme disait un de mes amis, n’a laissé que peu de place médiatique pour les autres écrivains – on a un peu écrit sur le décès de Eduardo Galeano, mais presque rien sur François Maspero. C’est dommage, car c’est grâce à François Maspero que la dissidence des années 1970 dans les pays de l’ est sous domination soviétique eut un reflet, une audience internationale dans les pays francophones et bien au-delà –   Varlam Chalamov «Récits de la Kolyma  », Gdansk la mémoire ouvrière, Robert Havemann « être communiste en Allemagne de l’est » pour simplement en nommer quelques-uns …. Néanmoins Marc Zitzmann a écrit une très belle nécrologie sous le titre « Zum Tod des Pariser Verlegers François Maspero – Partisan für die Freiheit »dans la Neue Züricher Zeitung, même si cet article ne prend pas en compte l’engagement pour la dissidence dans l’ancien bloc soviétique auquel appartenait aussi l’Allemagne de l’Est. Mais à part cette petite lacune c’est un bel hommage à François Maspero. Notons aussi que depuis peu il y a aussi un article sur François Maspero dans la wikipedia.de – traduit de l’article anglais.

Francois Maspero et les paysages humains scan CVL2Je ne connais François Maspero qu’à travers ces écrits,   – je n’ai jamais eu la chance de le connaitre personnellement. Pour ses années de libraire-éditeur j’étais bien trop jeune, – mais si j’avais eu de la chance de rencontrer durant ces dernières années j’aurais bien aimé lui demander ce qu’il pensait de l’Algérie contemporaine, de la montée de l’obscurantisme religieux dans le monde, de la montée des nationalismes en France, en Russie etc. ….

Je pense que François Maspero était aussi un géographe, – à travers ses écrits, ses textes et ses livres nous apercevons les regards d’un homme libre sur les paysages humains.

Sources:

Guichard, Bruno; Hage, Julien; Léger, Alain (Eds.) (2009): François Maspero et les paysages humains. Lyon (La fosses aux ours – a plus d’un titre). ISBN 978-2-35707-006-6

Simon, Catherine (2015) : « François Maspero – Editeur et écrivain ».In : Le Monde, Mardi 14 avril 2015, p. 16.

Photos : Scans de la couverture (vice &versa) du livre « François Maspero et les paysages humains »

Christophe Neff, écrit le 19.04.2015 à Grünstadt, publié le 19.04.2015

P.S. (21.04.2015: 18:55): Concernant la réception de François Maspero en Allemagne, – je viens de trouver cette nécrologie remarquable de Danilo Scholz « François Maspero (1932-2015) » dans le Blog de le revue « Merkur – deutsche Zeitschrift für europäisches Denken ». C’est un très bon texte méritant la lecture.

[1] Le livre est le catalogue de l’exposition éponyme sur François Maspero (voir ici et ici)

[2] Publié sous le titre « François Maspero, enfant des guerres du XXe siècle » dans version électronique pour les abonnes Le Monde.

[3]« De l’été 1959 jusqu’à la fin de l’année 1960, François Maspero « officie pratiquement seul (…), corrigeant, composant les livres et créant jusqu’aux couvertures », raconte l’historien Julien Hage, dans le très bel ouvrage, Maspero et les paysages humains (La Fosse aux ours-A plus d’un titre, 2009) qui lui a été consacré » citation extrait de Simon, Catherine (2015) : « François Maspero – Editeur et écrivain ».In : Le Monde, Mardi 14 avril 2015, p. 16.

[4] Sous le choc de la disparition de François Maspero Edwy Plenel a publié le chapitre « La Fidélité Maspero » dans son blog.

[5] Hage, J. (2009): Une brève histoire des librairies et des éditions Maspero   1955- 1982. In : Guichard, Bruno; Hage, Julien; Léger, Alain (Eds.) (2009): François Maspero et les paysages humains. Lyon (La fosses aux ours – a plus d’un titre), p. 93- 160.

[6] Maspero, F. (2009): Sadek Aïssat –   Postface à la réédition des Romans de Sadek Aïssat, Editions Barzakh, Alger 2009. In : Guichard, Bruno; Hage, Julien; Léger, Alain (Eds.) (2009): François Maspero et les paysages humains. Lyon (La fosses aux ours – a plus d’un titre), p. 298- 304.

[7] Dommage qu’a l’heure où j’écris ce billet on ne trouve pas d’article sur le journaliste et écrivain Sadek Aïssat dans la wikipedia.fr.

Blognotice 11.04.2015: A la recherche des souvenirs d’un vieux texte de 2001 « Deux ou trois choses que j’ai vues de l’Algérie» de François Maspero

En regardant « Algérie, la mer retrouvée » dans l’émission Thalassa du 03.04.2015, en voyant la ville de Béjaïa et les images de la Kabylie défilaient sur l’écran devant moi, en écrivant mon dernier billet sur cet épisode de Thalassa, – les souvenirs d’un texte que j’avais lu il y a presque quatorze ans dans le Monde en novembre 2001, me ressurgissaient, me réapparaissaient car il y avait des phrases qui étaient comme gravées dans ma mémoire pour toujours, des phrases inoubliables ….comme par exemple « Sans qu’il soit besoin de recourir à l’atroce liste des journalistes, des professeurs, des médecins assassinés, toute une élite culturelle, il y a dans chaque famille algérienne la mémoire d’un drame. L’évocation des années récentes, où des quartiers entiers d’Alger étaient tenus par la terreur, où dans la Mitidja, des bandes tuaient familles et populations entières : à Benthala, à Raïs, à Sidi-Hammed, à Beni-Messous ou sur la route Alger-Larba, toujours à quelques kilomètres de la capitale. » C’est un texte de François Maspero, un texte que l’abonné au Monde peut encore trouver dans les archives du Monde, – un texte qu’on peut encore trouver sur le site d’Algeria Watch sous le titre « Deux ou trois choses que j’ai vues de l’Algérie » – un texte du Journal le Monde qui mériterait largement un accès libre sur le site du Monde.fr – pour que tous les intéressés puissent le lire en toute liberté. Ce texte de François Maspero, écrit en 2001 pour le Journal le Monde, un texte un peu oublié de nos jours, mais un texte qui mérite la (ré) lecture. En voyant les images de Béjaïa défiler devant moi dans l’écran du poste de télévision en regardant « Algérie, la mer retrouvée » – dans l’émission Thalassa du 03.04.2015, je pensai à ce texte, – même si je ne sais pas si le texte parle réellement de Béjaïa[1] – mais comme l’écrit Maspero ceci n’a aucune importance « Elle se trouve au centre d’Oued-Baïra (par respect pour la vie privée de ceux qui m’ont accueilli, j’ai changé le nom de la ville, qui pourrait être n’importe laquelle de celles qui se succèdent sur la côte algéroise, de Tipaza à Boumerdès), qui, avec ses quarante mille habitants, face à la mer et tournant le dos à la plaine de la Mitidja, garde des vestiges de ce qui fut une petite agglomération de colons et une station balnéaire accueillante ». Apres avoir écrit mon dernier billet, j’ai trouvé ce texte de Maspero cité dans un article d’Odile Berki (2004) sur une expérience paysagère à Béjaïa et de ses paysages environnantes. On pourrait donc penser que le texte de Maspero se situe réellement à Béjaïa. Mais l’important c’est, en relisant Maspero, de voir ce qui a changé en presque quinze ans sur les côtes algériennes, ce qui n’a pas changé et peut être ce qui devrait changer ! Le texte, ou disons l’essai « géographique » d’Odile Berki, mérite aussi la lecture. On devrait demander à l’auteur, ce qui a changé à Béjaïa depuis qu’elle a écrit son essai. Pour finir ce petit billet sur les traces des paysages Béjaïa, les souvenirs du texte « Deux ou trois choses que j’ai vues de l’Algérie » de François Maspero constatons qu’une géographie régionale moderne de l’Algérie, à ma connaissance, n’existe pas. Cette géographie régionale de l’Algérie attend encore d’être écrite. Pour ma part cela me renvoie à ma jeunesse, à mes débuts de géographe où parfois je rêvais d’écrire un livre sur les paysages méditerranéens de l’Algérie… mais comme je n’ai jamais mis les pieds en Algérie, ce livre n’a jamais vu le jour …. Dans ma petite bibliothèque il reste des traces de ces temps où je collectionnais un peu tout ce que je pouvais « attraper », qui me tombait dans les mains sur l’Algérie , comme ce petit livre « Lettres d’Algérie ». Lettres d’Algérie – rassemblées par Philippe Bernard et Nathaniel Herzberg – publié par le Monde et les éditions Gallimard en 1998. Ce livre aussi mérite une relecture, – peut être même une réédition augmentée avec si possible les témoignages des auteurs de ces lettres sur l’Algérie des années 2010-2015 …..

Sources:

Berki, Odile (2004): « Une expérience paysagère : Béjaïa et ses environs, entre violence et douceur de vivre », Strates [En ligne], 11 | 2004, mis en ligne le 14 janvier 2005, Consulté le 29 mars 2015. URL : http://strates.revues.org/437

Bernard, Philippe ; Herzberg, Nathaniel (1998) : Lettres d’Algérie. Rassemblées par Philippe Bernard et Nathaniel Herzberg. Paris, Gallimard-Le Monde, ISBN 2-07-040498-6

Maspero, François (2001): « Deux ou trois choses que j’ai vues de l’Algérie », Le Monde, 22.11.2001 (consulté via les archives Le Monde), consultable sous : http://www.algeria-watch.org/farticle/tribune/maspero.htm

Christophe Neff, le 11.04.2015

[1] Je pense même que le texte de Maspero ne parle pas de Béjaïa, mais bien d’une ville tournant le dos à la plaine de la Mitidja dans les environs d’Alger. Dans ce contexte je conseille aussi de lire ce reportage de Florence Beaugé « En Algérie, dans la Mitidja, ni pardon ni oubli » datant de septembre 2005.

Des paysages à l’infini – « Algérie, la mer retrouvée » – sur l’émission Thalassa du 03.04.2015

Des paysages à l’infini, des paysages d’une beauté inoubliable à perte de vue. En regardant le documentaire « Algérie, la mer retrouvée[1] » d’Alexis Marant et Guillaume Pitron sur Thalassa[2] vendredi 3.4.2015 je fus projeté 16, presque 17 ans en arrière. Le Professeur Manfred Meurer[3], membre de mon jury de thèse de doctorat[4] m’avait demandé, si je pourrais encadrer une de ses doctorantes, – une algérienne travaillant sur la flore algérienne. J’avais jusque-là lu presque tous les ouvrages sur la géographie et les paysages algériens, – et étant en charge de cette doctorante depuis 1999 – je voulais tout de suite saisir l’occasion pour faire un voyage d’étude en Algérie, pour connaitre de mes propres yeux ce pays que je considérais comme un des plus beaux pays monde. Mais Abida Z., la doctorante algéroise du Prof. Meurer me disait, – Monsieur Neff, n’y aller pas, – vous avez des enfants … vous savez les islamistes, le GIA   ….c’est trop dangereux – vous risquez de ne plus voir vos enfants de ne jamais revenir en Allemagne, de ne jamais revoir votre épouse, votre mère, votre grand-mère. C’était le temps où l’Algérie fut déchirée par une terrible guerre civile – ce fut la décennie noire qui ensanglanta l’Algérie. En regardant les belles images du film d’Alexis Marant et Guillaume Pitron on pourrait croire, que ces années cauchemardesques, sont des souvenirs d’un autre temps, presque oublié, – mais l’assassinat de Hervé Gourdel en Septembre 2014 en Kabylie dans le massif de Djurdjura par les soldats du califat, nous a rappelé que ces cauchemars des années 1990 sont encore bien vivants et réapparaissent brusquement de temps en temps. Finalement donc je ne suis jamais parti en Algérie. En 2005[5] je commençais dans l’équipe du Professeur Meurer à l’ancienne Université de Karlsruhe[6], devenue depuis le KIT, en charge de de plusieurs projets de recherche en Tunisie, ainsi commençèrent mes années tunisiennes, – mes rêves d’Algérie s’éloignaient de plus en plus – et j’apprenais à aimer la Tunisie et ses paysages – ce qui me valut à la longue d’être considéré en Allemagne comme un des rares spécialistes allemands de la Tunisie. Durant l’année 2007 j’aurais encore eu l’occasion de travailler dans un projet de recherche écologique appliquée avec Gonzague Pillet à Annaba en Algérie, mais Gonzague Pillet décéda brusquement en automne 2007, et l’Algérie s’éloigna définitivement de mes intérêts et obligations professionnelles.

En voyant les magnifiques images des côtes algériennes du reportage d’Alexis Marant et Guillaume Pitron sur la cote algéroise, – je me suis dit, qu’un jour je ferai ce voyage en Algérie, dont j’ai toujours rêvé, au plus tard à l’Age de la retraite. Ma retraite je pourrais la prendre dans 17 ans, – espérons qu’ entre-temps les autorités algériennes ne vont dilapider, bétonner cette merveilleuse côte qui est un vrai trésor. Ne surtout pas commettre les erreurs espagnoles, – succomber à l’argent facile du tourisme de masse – et d’abandonner cette merveilleuse côte à la littoralisation, californisation – au bétonnage tout court. Ce littoral mérite mieux que l’exemple effrayant des côtes méditerranéennes espagnoles. Je pense qu’ en développant un tourisme durable on pourrait très bien développer les côtes algériennes sans mettre en péril la valeur écologique et esthétique de ses paysages côtiers uniques. D’Oran jusque à Annaba le film d’Alexis Marant et Guillaume Pitron nous a fait découvrir une cote merveilleuse, mais aussi une jeunesse, des femmes et des hommes, qui prennent leurs destins en main pour un meilleur avenir. Enfin le film m’a donné envie de ne pas attendre jusqu’à ma retraite pour découvrir l’Algérie, ces merveilleuse côtes, découvrir les paysages du Parc national de Gouraya ….. et encore beaucoup plus. De prendre le ferry depuis Marseille, me réveiller à l’aube à Alger la blanche, de monter à la Basilique Notre-Dame d’Afrique, de faire le voyage à Tibhirine pour déposer une gerbe à l’ Abbaye Notre-Dame de l’Atlas en mémoire des sept moines de Tibhirine assassinés, de poursuivre la route traversant toute l’Algérie d’ ouest en est pour finalement après avoir visité le parc national d’El-Kala, d’arriver à Tabarka en Tunisie. On peut toujours rêver ….

Christophe Neff, le 05.04.2015

[1] Voir aussi « L’Algérie à la reconquête de son littoral »

[2] Ce n’est pas la première fois que j’écris sur un épisode de l’émission Thalassa, voir : Quelques remarques sur Thalassa à Lisbonne (émission du 11.9.2009) et la littoralisation du Cap Saint – Vincent (Cabo de São Vicente) ; Quelques remarques sur Thalassa : escale à Tunis (émission du 16.10.2009) ; Quelques mots sur le reportage « la route australe » d’Emilio Pacull dans l’émission Thalassa du vendredi 26.11.2010

[3] Le Professeur Manfred Meurer était considéré en Allemagne comme un spécialiste des écosystèmes méditerranéens, de l’Afrique francophone et surtout de la Tunisie.

[4] Les membres du jury de ma thèse de doctorat furent entre autres les Professeurs suivant: Wolfgang Cramer, Peter Frankenberg, Reinhard Männer (Doyen), et Manfred Meurer.

[5] Jusque en mars 2005 j’étais Post-Doc en géographie à l’ Université de Mannheim.

[6] De nos jours l’Université de Karlsruhe se dénomme Institut de technologie de Karlsruhe ( KIT).