
C’était peut être une simple coïncidence, mais le jour où en Tunisie les élections législatives tunisiennes de 2014 avait eu lieu, – je dinais au Gedächtnishaus Fohrenbühl, ou Turm comme on dit dans la Raumschaft Schramberg– le même endroit que j’avais décrit dans« Les lumières du Fohrenbühl et la révolution tunisienne (21.1.2011) ».
Pendant le week-end j’avais participé à la fête que mes camarades bacheliers avaient organisée pour notre 30Ième anniversaire de bac à Schramberg[1], – et comme le soleil brillait sur les hauteurs de la Forêt – Noire, – j’avais décidé de dîner avec une amie d’enfance au Gedächtnishaus Fohrenbühl. Un ciel bleu azur, – en allemand on dit plutôt stahlblauer Himmel (ciel bleu d’acier) plongeait le Fohrenbühl dans une étrange ambiance – ces fameuses lumières de Fohrenbühl (Licht des Fohrenbühl). C’est ici que j’avais passé les journées décisives de la révolution tunisiennes en janvier 2011 – journées et pensées que je décrivais dans le billet « Les lumières du Fohrenbühl et la révolution tunisienne (21.1.2011) ». Depuis, presque trois années sont passées, – mais ce que je écrivais déjà en janvier 2011 – « si il y a une société capable de construire une démocratie laïque, une société civile libre de ses propres mains et sans interventions externe, dans le Monde arabe et en Afrique c’est bien la société tunisienne » me semble encore être valable en automne 2014. J’y crois encore, – même si je sais bien que les difficultés que le Tunisiens ont devant eux sont immenses. Et il n’y a pas de solution miracle.
La Tunisie est devenue le principal bassin recruteur pour Da’ech. Le jour où tous ces apprentis djihadistes retourneront au pays en Tunisie, – la Tunisie devra faire face à une terrible menace, – des milliers des bombes à retardement qui pourront mettre en péril la jeune démocratie tunisienne. Mais je crois que ce péril dangereux est maîtrisable. A moyen terme l’avenir de la démocratie tunisienne se jouera principalement sur des questions socio-économiques. Comme je j’écrivais déjà dans le billet de 16.09.2012, tant que le djebel à faim, – . L’avenir pour la jeune démocratie tunisienne s’annonce plutôt sombre. Et les solutions miracles socio-économiques pour la Tunisie n’existent pas.
Dommage que les medias internationaux n’ont pas beaucoup parlé de ces élections historiques en Tunisie. Dans les medias français on en parlait un peu, – mais malheureusement les évènements à la une des medias était plutôt le départ forcé de Blaise Compaoré au Burkina Faso et les évènements tragiques du barrage de Sivens du 26.10.2014.
En Allemagne on en n’a presque pas parlé – à deux exceptions près. Une émission de discussion sur SWR2 « Arabiens Lichtblick – Wohin führt die Wahl in Tunesien? (Lueur d’espoir en Arabie – où les élections en Tunisie vont-elles nous mener)). Et dans la dernière Zeit un article de l’éditorialiste Josef Joffe sous le titre « Das Wunder von Tunis – Warum die Demokratie nur überlebt, wo die Revolution begann (le miracle de Tunis – pourquoi la démocratie ne fait que survivre là où la révolution commença) » Dans cet article Joffe évoque l’article qu’il avait écrit en janvier 2011, ou il préconisait que seule la Tunisie (Sonderfall In Arabien war nur Tunesien reif für die demokratische Revolution – Exception – seule la Tunisie est mûre pour la révolution démocratique)pourrait réussir sa transition démocratique. A part cela, – dans les medias allemands, pas beaucoup de réactions aux résultats des élections législatives tunisiennes de 2014. Dommage, car ce qui se passe en Tunisie, devrait aussi intéresser les medias allemands. Car si l’expérience démocratique échoue, – toute l’Europe sera concernée, – et pas seulement la France –et partiellement l’Italie –comme beaucoup d’allemands tendent à croire. L’Allemagne elle aussi sera concernée !
Pour le titre de ce billet j’ai choisi le titre « le miracle de Tunis » – emprunté au titre – disons à la traduction française du titre de l’article de Josef Joffe – das Wunder von Tunis – même si personnellement je ne crois pas que ces élections et leurs résultats ont quelque chose de miraculeux.
Les Tunisiens nous ont simplement montré qu’ ils sont capables de choisir eux même leurs chemins et leurs destins ! Sans ingérence extérieure !
Mais il il ne faut pas non plus se faire d’illusions – le chemin vers une société civile libre et entièrement démocratique sera lent et difficile.
Mais la Tunisie, les Tunisiennes et les Tunisiens peuvent réussir, s’ils prennent leur destin en mains, comme la France y a réussi il y a à peine deux siècles ! Ou l’Allemagne, du 9. Novembre 1989, jour de la chute du mur de Berlin, jour où l’Allemagne prit son destin en main. Qui aurait parié en 1980, quelques années avant 1989, sur la réunification des deux Allemagnes ?
Photo: Vue sur le Gedächtnishaus Fohrenbühl, dit le Turm, le 26.10.2014, jour des élections législatives tunisiennes 2014 © C.Neff 26.10.2014
Christophe Neff, écrit le 09.11.2014 à Grünstadt – jour du 25 iéme anniversaire de la chute du mur de Berlin, publié le 10.11.2014
[1] Voir aussi le billet « Blognotice 22.10.2014: Tempêtes et premières neiges sur la Forêt – Noire »