Le téléfilm de Férid Bougehedir , « Villa Jasmin » est passé Samedi dernier 30.5.2009 à la télévision- la critique de Véronique Cauhape dans le Monde Télévision reprise ici en bas dit presque tout.
Villa Jasmin un homme revient dans son pays, sur les traces familiales
»Serge et sa femme, enceinte de leur premier bébé, débarquent dans le port de la Goulette, à Tunis. Voilà vingt ans que Serge n’est pas revenu dans ce pays qu’il a dû quitter à l’âge de 11 ans, à la mort de ses parents, tout juste avant l’indépendance que son père espérait tant. Ses bagages à peine posés, le jeune homme part sur les traces de son enfance.
Chaque lieu fait remonter son lot de souvenirs : l’insouciance de l’avant-guerre, la douce présence de sa mère, le courage et l’enthousiasme de son père juif, socialiste et franc-maçon, résistant, déporté en Allemagne, relâché par miracle et libérateur de Paris. Adapté du roman de Serge Moati, Villa Jasmin (Fayard), le téléfilm de Férid Boughedir restitue assez bien le voyage intime d’un fils qui tente de rétablir le lien avec ceux qui l’ont laissé trop tôt orphelin, de recoller les deux morceaux de son histoire : l’avant et l’après de la mort de ses parents. Il perd hélas l’humour et le souffle romanesque qui portaient le livre et le coloraient de toutes sortes d’émotions. Ni rires ni larmes dans ce téléfilm. Seulement les belles couleurs de la Tunisie. » Veronique Cauhape Le Monde Television, 24.5.2009, p. 15 les choix du Samedi.
Presque tout, à rajouter quelques détails, idées et pensées personnelles. D’ abord en raison des circonstances expliquées dans le billet précédent je n’ai pas pu voir la totalité du film : pour moi le téléfilm s’arrête donc à la libération. Mais on pourrait espérer une version DVD, pour voir la fin du film, -comme j’attends encore une réédition de la DVD d’un été à la Goulette et Halfaouine l’enfant des terrasses , les deux grands films de Férid Boughedir.
Les belles couleurs de la Tunisie, du Golf de Tunis, de Sidi Bou Said, de la Marsa , de Tunis, – oui, la lumière du ciel au-dessus de Tunis, cette lumière d’été, cette atmosphère a été très bien reconstituée. Pour le reste, disons, que comme toujours dans les cas d’une adaptation littéraire en film ou téléfilm, – c’est toujours l’image transférée que le réalisateur se fait de l’œuvre originale, c’est la vision du réalisateur.
Dans le cas, de « Villa jasmin », tout laisse croire que Férid Boughedir a fait le film en collaboration avec Serge Moati . Ce que j’ai vu du film, m’a beaucoup plus, au point que s’il sortait un DVD du film, je serai sûrement acheteur. Naturellement si par chance, j’avais eu l’occasion de faire un film sur ma vision de Villa Jasmin, j’aurais mis plus d’importance à la communauté juive de Tunis, son histoire, ses vies ; le front populaire ; Serge Moati père (dans le Film Serge Boccara) le socialiste, l’homme de gauche qui vivait sur le rêve d’un monde meilleur, – et d’une autre façon j’aurais un plus détaillé le personnage de Rahn, – mais surtout Georges Guilbaud – le communiste devenue milicien, – dans un certain sens – l’anti- figure de Serge Moati père, – Georges Guilbaud figure complexe, qui devient porteur du mal. Mais je n’écris pas le billet du roman autobiographique de Moati, – ce sera peut être pour un autre article. J’ai fini donc ce billet, en me souvenant comment j’ai acheté le livre de Moati en juillet 2005 à la libraire Mille feuilles à la Marsa Gare, face à la Gare du TGM, comme je remontais via la corniche à l’Hôtel, – Hôtel Sidi Bou Saïd sur la colline de Sidi Dhrif où la GTZ loge habituellement ses experts scientifiques. Je suis souvent retourné depuis à l’hôtel Sidi Bou Saïd à Shidi Dhriff, et chaque fois que possible, quand j’avais une heure de libre entre deux rendez-vous, j’essayai de retourner, de descendre a travers les ruelles de Marsa la Corniche pour aller à la librairie Mille feuilles en face de la Gare du TGM.

Vue sur la libraire „Mille feuilles à la Marsa Gare“. Photo et Copyright: www.nachoua.com . Photo publiée avec l‘ autorisation de nachoua.com. (email du 31.5.2009)
En Juillet 2005 donc, j’avais acheté la version poche du livre de Serge Moati , avec comme couverture la Peinture de Didier Paquignon , – couverture de livre que j’utilise depuis comme transparent PowerPoint introduisant mes cours magistraux sur la géographie régionale du Maghreb.

Copie du transparent PowerPoint introduisant mon cour magistral sur la géographie régionale du Maghreb du semestre d’éte 2008.
J’ai lu l’ouvrage dans les trois nuits suivantes à l hôtel, – et pendant la lecture je retrouvais un peu le monde perdu de mon enfance quand mon grand – père me racontait sa gauche. Les mémoires d’une gauche, d’un monde meilleur, mais aussi cette vision d’une France- pays des droits de l’homme, pays du progrès, – ceci fut le monde de Jean Migliori, mon grand père, immigré italien, macaroni, rêveur marxist, résistant, socialiste, mitterrandiste avant que le mot « génération Mitterrand » fut invente. Monde, idées et histoires de mon grand père qui il me racontait, – le Journal Le Monde à l’appui, – et qui ressurgissait pendant ma lecture de l’ouvrage de Moati sur la colline de Sidi Dhrif surplombant Marsa la Corniche et Marsa Plage.
La seule critique que je me permettrai donc de formuler envers la réalisation de Férid Boughedir, c’est qu’à mon goût le personnage de Serge Bocara (alias Serge Maoti) ne ressort pas assez comme homme de gauche, comme socialiste pur et dur. Naturellement ceci reflète aussi l’image que je me faisais de Serge Moati père pendant ma lecture de Villa Jasmin à l’Hôtel Sidi Bou Said, – et cette image q’ on se construit pendant la lecture d’un roman n’est pas seulement le reflet de l’ouvrage lui-même, mais aussi du bagage culturel et socio-historique du lecteur.
Finissons donc avec une fin de note très personnelle, même ci cela n’ a à priori plus grand-chose à faire avec la réalisation du téléfilm « Villa Jasmin » de Férid Boughedir – ce que j’ avais aussi un peu retrouvé, ressenti dans le roman autobiographique de Serge Moati « Villa Jasmin », – c’ était d’ une part cette image d’une France imaginaire, porteur de civilisation positive, des droits de l’ homme, l’ école républicaine et laïque, aussi d’ une France qui accepta le rôle d’ un havre de paix et d’ un potentiel de réussite socio-économique, d’ autre part cette idée de la gauche, le rêve mobilisateur d’ un monde meilleur, d’ une société plus humaine, plus juste. Ces rêves et images que les Migliori, les Casciolas, les Moati, les Filipetti, et tous les autres que je ne connais pas, les juifs d’ Europe de l’ Est qui fuyaient les cauchemars d’ un Volodja parsemant les steppes ukrainiennes de pogromes, les italiens qui fuyaient la misère toute crue de leurs montagnes austères de l’Apennin, les arméniens qui cherchaient un havre de paix sûr, les portugais fuyant la misère de la vie rurale dans le Portugal de Salazar et le service militaire dans les colonies lointaines : ils portaient dans leur cœur ce rêve – cette image d‘ une France prometteuse qui fait encore rêver des oubliés et des perdus des nos jours quelque part en Afrique, les Harragas , – les passagers des pateras qui ,au moment où j’ écris ces phrases, divaguent, sombrent quelque part en Méditerranée, au détroit de Gibraltar ou sur l’ Océan atlantique . Naturellement , je sais bien que cette image d’une France offrant havre de paix et potentiel de réussite socio-économique, pays de la liberté et des droits de l’homme, était souvent une image chaste, loin des réalités vécues, mais ces rêves et images d’une France meilleure existaient et je suis sur qu’ils existent encore. En ce qui concerne la gauche socialiste, vu l’état actuel du P.S., j’ai malheureusement l’impression que le tableau s’est nettement assombri.
Et en écrivant ces dernières phrases, juste une semaine avant les élections européennes je me demande si en France il y a tout simplement encore une gauche, – une gauche qui peut mobiliser les rêves, les idées, les hommes. Vu d’Allemagne on a l’impression que le P.S. a cessé d’exister comme véritable force politique, comme parti rassemblant la gauche, des centristes, des libéraux avec le cœur à gauche (les Sozialliberale en allemand), jusque aux marge du P.C. Espérons que mon impression me trompe !
Une Europe unie, libre, démocratique, juste et sociale – ceci pourrait être une image pour une gauche visionnaire qui est encore capable de mobiliser des hommes et des idées un peu comme les valeurs et les idées qui ont mobilisé Serge Moati père et ses camarades socialistes, mon grand père Jean Migliori et tous les autres pendant les années 30 et 40 d’une autre ère.
Bibliographie et sources :
Cauhape, V. (2009) : Le Monde Television, 24.5.2009, p. 15 les choix du Samedi.
Moati, S. (2003) : Villa Jasmin, Paris (Fayard, le livre de Poche).
Christophe Neff, Grünstadt le 2.6.2009
P.S. : Des très belles photos de la Marsa se trouvent sur ici .
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