Vendredi 11. Janvier 2013 «François Hollande engage l’armée française dans le conflit malien ». A juste titre le Monde du Dimanche 13 – Lundi 14 janvier 2013 écrit « La France entre en guerre contre les islamistes au Mali ». François Hollande a pris une décision courageuse, – face à des choix extrêmement difficiles. Sans intervention extérieure, les islamistes auraient fait tomber Bamako en deux ou trois jours. Bamako aux mains des narco-islamistes aurait pu déstabiliser une grande partie de l’Afrique occidentale, le Sahel, le Maghreb et cette chute aurait certainement eu aussi des conséquences géopolitiques pour les états riverains de la méditerranée. D’autre part il plane une menace horrible sur le sort des otages français aux mains des groupes islamistes.
Mais on oublie assez souvent les centaines de milliers de maliens pris en otages par les diffèrent groupes de la mouvance narco-islamiste. Ces maliens qui attendent avec impatience qu’ils soient enfin délivrés de ce régime moyenâgeux qui les terrorisa avec tout l’épouvantail des châtiments corporels que prévoit la charia – lapidation, amputation des membres …. Dans ce contexte il faut aussi rappeler le courage des populations locales, que ce soit à Tombouctou comme à Gao, qui durant l’été dernier ont eu le courage de manifester contre leurs tortionnaires. Et en plus il y eut la destruction des mausolées de Tombouctou, trésor de l’humanité. Pour avoir une image des cauchemars vécus par les populations du Nord du Mali je conseille de (ré)-lire l’interview de Moctar Mariko, président de l’Association malienne des droits de l’homme, publiée dans slateaafrique le 6. Décembre 2012.
J’approuve la décision courageuse de François Hollande de répondre aux demandes d’aide des autorités maliennes et d’intervenir militairement au Mali. Par contre je ne crois pas que l’utilisation de forces armées des pays membres de la Cédéao soit une bonne idée. Cédéao cela rime toujours avec chaos et envinemement – là je rejoins l’analyse de Philippe Duval « En sortir, ce n’est sûrement pas introduire sur le théâtre malien les troupes de la Cédéao, qui, dans toutes les crises régionales où elles sont intervenues, ont joué le rôle d’aggrave-affaires. » publié récemment dans un article (Nord-Mali: les djihadistes surestiment leurs forces) de Slate-Afrique. Il est sûr que les différents groupes et groupuscules rebelles du Nord du Mali ne partiront pas sans l’utilisation de la force. Mais la force ne résoudra pas les problèmes fondamentaux du Nord du Mali. Une fois l’intégrité territoriale du Mali restituée – il faudra enfin trouver des solutions durables pour le développement du Nord du Mali – et cela inclut aussi de trouver enfin une vraie solution aux problèmes des Touaregs , sans quoi les problèmes réapparaitront au plus tard au cours la prochaine décennie.
Pour finir, j’aimerais aussi porter l’attention sur les fables qui circulent dans les medias et la toile sur les liens entre l’intervention franco-anglo-americaine en Lybie et la désintégration territoriale du Mali. La chute du régime de Kadhafi en Lybie a certes précipité certaines dynamiques au Nord du Mali, – mais bien avant la chute de Kadhafi le Nord du Mali était un pays aux proies des islamo-trafiquants – où l’autorité de l’état malien était quasiment inexistante et l’industrie de l’enlèvement florissait. Qui se souvient encore de la fin tragique de Michel Germaneau (j’en parlai aussi un petit peu ici) pour citer un seul nom ?Intervenir au Mali et restituer l’intégrité territoriale du Mali, cela veut dire aussi en finir pour toujours avec cette industrie de l’enlèvement qui sévit dans le Nord du Mali.
Mais actuellement nous ne sommes qu’au début de l’opération Serval – et l’intégrité territoriale du Mali est encore loin d’être rétablie. L’opération Serval risque aussi de devenir une longue opération militaire avec une issue incertaine – des victimes, des dégâts collatéraux etc. Mais si la France avait décidé de ne pas intervenir au Mali – on risquerait bien de voir le drapeau noir des djihadistes flotter sur les toits de Bamako avant la fin du mois de janvier 2013.
Christophe Neff, le 14.01.2013