Le dernier week-end fut un week-end de commémoration en Allemagne. Il y a cinquante ans, le 13.8.1961 le mur de Berlin, – die Berliner Mauer – fut construit. Les medias allemands étaient pleins d’articles, d’émissions de commémorations, – postings de blogs de souvenirs etc. Ceci pour la version officielle , mais j’ai bien eu l’impression que tous ces « événements de souvenirs» , pour une grande partie de la population n’ont plus une très grande importance ; au moins pour les jeunes générations, pour eux le Mur de Berlin « die deutsche Teilung » c’était le Monde de leur parents, de leurs grand parents et tout cela est pour eux très loin du « Alltag » du quotidien contemporain. J’appartiens à une génération, ( même si je n’ai pas vécu le Mauerbau, car je suis ne en 1964) qui a toujours vécu avec l’omniprésence du mur – die Mauer im Kopf – jusqu’ à la chute du mur en novembre 1989. En automne 1989 quelques semaines avant la chute du mur de Berlin j’absolvais mon stage d’élève d’officier de réserve à la Offiziersschule des Heeres à Hanovre et durant ce stage nous avons fait un sortie de reconnaissance du rideau de fer : armés de jumelles nous étions censés reconnaitre les grades et les unités des Grenztruppen en service quelque part dans le secteur entre Wolfsburg et Goslar. Quelques semaines plus tard, le 11 novembre 1989 ce fut la chute du mur de Berlin et l’ Allemagne trouva enfin la paix après 136 morts les « Maueropfer » dont Ida Siekmann, Heinz_Sokolowski, Peter Fechter, Chris Gueffroy et 132 autres (voir Liste der Todesopfer an der Berliner Mauer ).
Une chose que je trouvais assez stupéfiante durant ce week-end de commémoration du « Mauerbau » – on ne parla guère du fameux discours de Willy Brandt devant les Berliner Abgeordneten du 13.8.1961 , j’ai trouvé une petite citation dans l’article « 50 ans après, l’Allemagne se souvient du „Mur de la Honte“ » de Frédéric Lemaître, – «Cinquante ans après, les dirigeants de l’Allemagne réunifiée ont tenu à commémorer „ce jour fatal de l’histoire allemande“, selon l’expression du président de la République, Christian Wulff. Devant environ 500 invités dont la chancelière Angela Merkel et une foule de plusieurs centaines de personnes, le président a rendu hommage aux 136 victimes décédées lorsqu’elles tentaient de franchir le Mur. Un nombre sans doute inférieur à la réalité. „Nul ne connaît le nombre exact“ a rappelé le président. Évidemment, celui-ci s’est également félicité que „la liberté soit invincible“ et que le Mur soit tombé le 9 novembre 1989. Voulant, comme sa fonction l’exige, se tenir au-dessus des partis, Christian Wulff, membre de la CDU, a aussi salué Willy Brandt, maire social-démocrate de Berlin en 1961 qui, dès le 13 août, a déclaré que „les hommes ne peuvent être tenus durablement en esclavage“ » mais dans les medias allemands je n’ai pas trouvé grand chose. Le Bundespräsident Christian Wulf dans son discours de commémoration l’avait bien cité « Willy Brandt hatte es bereits am Abend des 13. August 1961 den Bürgern in der DDR und in Ostberlin zugerufen: „Noch niemals konnten Menschen auf die Dauer in der Sklaverei gehalten werden.“ – comme l’écrit Lemaitre dans « 50 ans après, l’Allemagne se souvient du „Mur de la Honte“» mais la retombée médiatique en Allemagne ne fut presque pas audible.
Discours de Willy Brandt qui mérite encore de nos jours d’être lu et relu – car on y trouve des phrases qui n’on rien perdu de leurs actualité « Lassen Sie sich nicht fortreißen, so stark und berechtigt die Erbitterung auch sein mag. Ergeben Sie sich nicht der Verzweiflung. Noch ist nicht aller Tage Abend. Die Mächte der Finsternis werden nicht siegen. Noch niemals konnten Menschen auf die Dauer in der Sklaverei gehalten werden. (Ne vous laissez pas arracher par l’amertume, – même si celle ci semble insupportable et justifie. Ne vous laissez par emporter par le désespoir. Ce n’est pas la fin du Monde. La tyrannie des ténèbres ne va pas triompher. Les hommes ne peuvent être tenus éternellement en esclavage (trad. C.Neff))». Ces mots que Willy Brandt exprima lors de la construction du mur de la honte à Berlin, – n’ont rien perdu de leur pertinence – il suffit simplement de porter le regard vers la Corée du Nord, l’Iran, la Syrie – pour en citer quelques uns de ces états où la liberté d’opinion est quasiment inexistante – et l’homme souvent réduit à l’esclavage.
Source :
Brandt, Willy (1961): Erklärung des Regierenden Bürgermeisters von Berlin, Willy Brandt, vor dem Berliner Abgeordnetenhaus am 13. August 1961. Pressedienst des Landes Berlin, Nr. 173 vom 13. August 1961, S. 3-8. Abgedruckt in Siegfried Heimann (Bearb.): Berlin bleibt frei. Politik in und für Berlin 1947- 1966 (Willy Brandt – Berliner Ausgabe, Band 3, hrsg. von der Bundeskanzler-Willy-Brandt- Stiftung, Bonn 2004, Dokument Nr. 66). Download/chargeable chez la Bundeskanzler Willy-Brandt Stiftung.
Christophe Neff